Marthe Robin

Père MICHON au Foyer de Charité de Mendès, aux Jeunes en préparation pour la JMJ de Rio, après la messe de ce dimanche 14 juillet 2013
Canevas d’une rapide présentation de Marthe Robin pour donner du relief à ce qui me semble être, aujourd’hui, l’essentiel

I Marthe : une femme de la Galaure, une rurale, très ouverte et de grande humanité.

  1. Elle connaît bien les familles de la Galaure, elle aime beaucoup les agriculteurs. Divers témoignages. « La vocation de la France, c’est d’être un jardin »

  2. Elle est attentive aux besoins des personnes, dans leur profession, dans leurs difficultés ; les jeunes : comment vont-ils se préparer à leur avenir ? 1953 : début d’une école ménagère, qui deviendra "Les Mandailles".

  3. Une jeune fille, une femme brisée par la maladie, mais qui restait très ouverte : on découvre maintenant qu’elle a beaucoup lu. Tout l’intéresse. Ne pas en rester à "Marthe qui n’a même pas passé son certificat d’études". Elle interroge, pas par curiosité, mais par empathie, c’est-à-dire pour ressentir ce que chacun vit et porte comme désirs et fardeaux. La meilleur définition de l’empathie, je la trouve en Romains 12,15 : « Réjouissez-vous avec qui est dans la joie, pleurez avec qui pleure. » Ce n’est pas de la sensiblerie, encore moins une comédie, c’est être « à chacun et à tous ». Elle prend à coeur ceux / celles qui viennent à elle, quels qu’ils soient, mais sans chercher à influencer. Souvent elle renvoie chacun à son devoir d’état, à ses supérieurs. On la sent toujours libre intérieurement, elle pose les bonnes questions, souvent inattendues, jamais conventionnelles. Elle se souvenait de chacun ; alors chacun se sentait unique à ses yeux.

II Le moteur de son ascension mystique : elle a appris à transformer l’obstacle en moyen.

Elle le dit très simplement – et maintenant nous le chantons – : « Que tous les jours de notre vie, Chaque instant de notre vie Soient offerts avec Jésus et en Jésus Au salut des âmes. La souffrance est un travail [au sens d’accouchement] de vie et d’amour, C’est une richesse à offrir et à donner, Car les difficultés ne sont plus obstacles, Mais des moyens pour mieux aimer Jésus. » Elle a d’abord résisté aux épreuves (la maladie, la solitude, des incompréhensions qui n’ont pas manqué...), mais par de fréquents et cachés petits « Fiat, ô mon Jésus », elle fait tout monter et converger vers Jésus et Marie. Elle appelle cela « l’offrande ». Plus tard, elle dira que c’est son « sacerdoce de laïque ». J’ajoute : c’est aujourd’hui celui des membres du Foyer. Cela me rappelle la sainte Ecriture. Osée chap. 2, 17 : Dieu rêve d’aimer à nouveau son épouse, Israël, qui lui a été très infidèle. « Là, je transformerai la vallée de la tristesse en porte d’espérance. » Pour Marthe, consentir à Jésus et consentir au réel : c’est la même chose. C’est le réalisme de l’Incarnation. Ce que vivent les personnes l’intéresse plus que leur religion.

III Son secret pratique – au sens montfortain – c’est sa relation quotidienne à la Sainte Vierge.

Déjà toute petite, elle lui parle : « Mes soeurs ne voulaient pas que je prie tout le temps, mais je priais, dans mon lit surtout ... Je priais la Sainte Vierge, je lui parlais surtout. » Ainsi, toute seule, elle apprend à faire toutes choses : par Marie, avec Marie, en Marie et pour Marie. Vers 1930, le Père Faure lui apporte un exemplaire du « Secret de Marie » de saint Louis-Marie Grignion de Montfort, qui résume l’essentiel du « Traité de la vraie dévotion » sous-entendu à la Sainte Vierge, qui est le meilleur et le plus sûr moyen d’entrer dans la Sagesse de Dieu, qui est Jésus Christ en personne. Cette consécration à Jésus par Marie, Marthe l’a donc vécue et pratiquée bien avant de la lire dans les oeuvres du Père de Montfort, et bien avant la première retraite de septembre 1936, prêchée par le Père Finet. « Aimer Jésus comme l’aimait Marie, et aimer Marie comme l’aimait Jésus. »

IV La grande mission de Marthe et des Foyers de Charité avec elle.

Marthe me semble être un extraordinaire don de Dieu pour le monde d’aujourd’hui. Je le résume en trois points :

  1. La grâce de Marthe et la mission des Foyers, c’est de (re)découvrir la paternité de Dieu : Dieu est Père, mon Père, notre Père, d’une façon unique, céleste. « Nos communautés sont et doivent être, de plus en plus, des lieux où le coeur miséricordieux du Seigneur bat au rythme de la misère du monde. La paternité de Dieu est une paternité de miséricorde : elle rattrape le pécheur pour en faire un fils et réaliser ainsi son plan d’amour ! La vocation des Foyers de Charité, c’est de ramener l’humanité au Père. » 

  2. La grâce de Marthe et la mission des Foyers, c’est de (re)venir à Jésus, au Christ total (Christus totus, disait déjà saint Augustin), donc y compris l’Eglise qui est son Corps, en le prenant tout entier dans sa Pâque. C’est ce que Marthe a vécu chaque semaine, dans son âme et avec son corps, pendant 50 ans :

    • le Jeudi saint : le paradigme du lavement des pieds ; l’institution de l’Eucharistie et, à son service, celle du sacerdoce.
    • le Vendredi saint : chaque pas, chaque douleur et l’union constante de Jésus à son Père durant toute sa Passion, le chemin de croix et jusqu’en sa mort. Les 7 paroles de Jésus sur la croix sont comme les 7 fenêtres de son Coeur.
    • le Samedi saint : Jésus descend dans nos enfers, dans les miennes, et là où nous ne pouvons plus rien pour personne. C’est un mystère de Visitation, plein d’espérance.
    • sa résurrection, sa Victoire sur le péché et sur la mort, qui se déploie jusqu’au matin de Pentecôte, avec ce sommet que fut l’Ascension, c’est-à-dire son retour vers le Père.


  3. La grâce de Marthe et la mission des Foyers, c’est de hâter la venue de l’Esprit Saint en vue d’une nouvelle Pentecôte. L’Esprit Saint est perçu et reçu comme un dynamisme intérieur, un levain, une onction, un feu. Il est « Celui qui vivifie », comme dit le Credo, c’est-à-dire : il purifie, il sanctifie, il ennoblit, il embrase les personnes et toutes les activités humaines, depuis celles de la vie privée et jusque dans la vie professionnelle, voire dans une vocation familiale, un service politique, un apostolat ecclésial (cf. Shabbaz Bhatti).

« Comment embraser les autres, si on n’est pas soi-même brasier ? »